Héros de la CAN 2021, meilleur buteur et meilleur passeur de l’histoire des Lions, Sadio Mané reste l’icône incontestée du football sénégalais. Mais sa prestation en demi-teinte contre le Soudan a ravivé les interrogations : peut-il encore porter seul la sélection ou doit-il désormais se réinventer en guide d’une génération montante ?
Depuis bientôt douze ans, il incarne bien plus qu’un joueur de football. Sadio Mané est devenu le symbole d’une génération dorée, l’homme des buts décisifs, le visage de la première Coupe d’Afrique des Nations remportée par le Sénégal en 2022. Mais à l’heure où les Lions se projettent vers la CAN 2025 et la Coupe du monde 2026, une interrogation discrète mais réelle s’installe : la prestation poussive de Mané contre le Soudan, à Dakar, révèle-t-elle une simple parenthèse ou le signe d’un glissement inéluctable dans son rôle au sein de l’équipe nationale ?
Muet depuis la première journée
Le constat, d’abord, est factuel. Face aux Crocodiles du Nil, Mané a semblé emprunté. Peu de prises de vitesse, des tentatives brouillonnes, une influence réduite sur le collectif. Dans un match où l’on attendait son habituel éclair de génie, c’est surtout la jeunesse qui a animé le jeu à l’image d’un Pape Matar Sarr qui a confirmé une certaine maturité et qui demeure le Lion le plus décisif de ces éliminatoires de la Coupe du Monde 2026 (3 buts et une passe décisive). Une nouvelle performance poussive pour celui qui n’a plus trouvé le chemin des filets dans ces qualifications depuis son doublé de la 1ère journée face au Soudan du Sud. Une grosse dis
La tentation est grande d’y voir un signe du temps. Mané n’a plus l’explosivité d’Anfield, ni la fraîcheur d’un joueur de 24 ans. Son exil en Arabie saoudite, malgré de bonnes statistiques, l’expose moins à l’exigence des grands championnats européens. Forcément, la comparaison avec l’époque où il faisait trembler Manchester City, le Bayern Munich ou n’importe quel cador d’Europe alimente une certaine nostalgie.
Leader technique ou mentor générationnel ?
Pourtant, réduire Mané à un joueur en déclin serait réducteur. Car le rôle qu’il occupe dépasse la dimension purement athlétique. Leader silencieux, capitaine de substitution ou encore relais naturel du sélectionneur, il reste l’homme qui rassure et guide. Ses coéquipiers continuent de se tourner vers lui dans les moments de doute. Son palmarès, sa constance et son abnégation sont des repères dans une équipe en pleine transition générationnelle.
La question est donc moins celle de sa pertinence que de son positionnement. Peut-il encore être le moteur unique du jeu offensif des Lions ? Probablement pas. Doit-il se réinventer en mentor, en accompagnateur, en joueur capable de libérer ses jeunes partenaires de la pression tout en restant décisif ? C’est là que se joue la réponse. Le sélectionneur des Lions marche sur une ligne étroite. Retirer Mané serait un pari risqué, mais lui accorder trop de liberté pourrait freiner l’éclosion des jeunes. « C’est moi l’entraîneur, je décide. Il a plus de liberté, un rôle d’électron libre, mais l’essentiel, c’est qu’il soit performant », a tranché Pape Thiaw après la victoire contre le Soudan (2-0). La gestion du cas Mané pourrait bien conditionner l’équilibre de l’équipe dans les prochaines compétitions.
Kinshasa comme test
Mané, fidèle à lui-même, ne s’épanche pas. Il préfère le terrain aux discours, le travail silencieux aux grandes déclarations. Ses prochains matchs diront si la prestation contre le Soudan n’était qu’une anomalie ou l’indice d’une transformation plus profonde. Le meilleur buteur et meilleur passeur de l’histoire de l’équipe nationale du Sénégal (46 réalisations et 26 offrandes en 114 sélections) pourra faire taire les critiques dès ce mardi face à la Rd Congo dans ce qui sera la finale de la poule B. Face à un Aaron Wan Bissaka qui le surveillera comme du lait sur le feu comme au temps de leur duel en Premier League, l’enfant de Bambali sera attendu pour mettre le feu dans l’arrière garde congolaise dans un match où la gagne est impérative pour les Lions. Plus qu’un choc de qualification, c’est un test grandeur nature : savoir si Mané peut encore illuminer les grands rendez-vous ou s’il doit désormais écrire la suite de son héritage autrement.
Lamine Mandiang DIEDHIOU