La 31ème édition de l’Afrobasket masculin se tiendra du 12 au 24 août dans ces trois villes angolaises : Benguela, Luanda et Namibe. Médaillé de bronze en 2017 et 2021, le Sénégal court après un 6ème titre continental depuis 1997, année de son 5ème sacre. Gonflés à bloc après leur carton plein dans les éliminatoires, les Lions sont déterminés à aller chercher le Graal. En tout cas, tous les signaux sont au vert pour mettre fin à cette longue disette : la qualité du staff technique et le potentiel des joueurs. Cette campagne pourrait être la bonne si toutes les conditions sont réunies et mises autour de l’équipe. Mais il faudrait avoir une bonne préparation et revoir l’organisation interne de l’équipe.
Stats prometteuses…
Les éliminatoires de l’Afrobasket 2025 ont révélé la montée en puissance du Sénégal qui est la meilleure équipe de ces qualifications. Les Lions ont la meilleure évaluation (667) devant la Côte d’Ivoire (660) et l’Égypte (550). Ils arrivent en tête au scoring (550 pts), suivis des Éléphants (537 pts) et des Pharaons (480 pts). Le secteur des rebonds est dominé par le Sénégal (346). Le Cameroun (293) et le Nigeria (275) sont 2ème et 3ème. Sur les trois majeurs, le Sénégal est juste devancé au niveau des passes décisives par la Côte d’Ivoire (136). Les Lions ont délivré 135 caviars. L’Angola et le Soudan du Sud arrivent en 3ème position avec 117 passes décisives.
Ces statistiques sont importantes. En 2021, la Tunisie, la Côte d’Ivoire et le Nigeria avaient fait un sans-faute dans les éliminatoires, alors que le Sénégal avait réussi un 5 sur 6. Les Aigles de Carthage ont été sacrés devant les Éléphants, tandis que les Lions ont fini à la 3ème place. Malgré son parcours dans les éliminatoires, le Nigeria s’est arrêté en 8èmes de finale. « Le Sénégal a la meilleure équipe d’Afrique. Je le vois gagner le prochain Afrobasket », disait à Rabat le président de la Fédération malienne de basketball, Jean-Claude Sidibé.
Un groupe qui s’épanouit
Les Lions ont acquis beaucoup d’expérience, ces dernières années. L’équipe s’est bonifiée à force de se frotter aux meilleurs du continent dans les éliminatoires des Jeux Olympiques, de la Coupe du monde ou de l’Afrobasket. Les joueurs sont plus compétitifs et évoluent pour la plupart dans de tops clubs européens, africains, américains et asiatiques. Le fait de jouer des compétitions comme l’EuroCup, la League des Champions, la Basketball Africa League ou autres apportent un plus dans leur manière d’appréhender les joutes continentales. Certains joueurs sont là depuis près de 10 ans à l’image de Youssou Ndoye, Brancou Badio et Lamine Sambe qui guident leurs cadets. L’expérience et la jeunesse constituent l’une des forces de cette équipe.
En plus, ce groupe vit bien. C’est une bande d’amis et certains ont cheminé dans les sélections jeunes ou ont joué ensemble à Seed Academy, entre autres clubs locaux et centres formation. Il n’y a pas de star dans ce groupe. Ça rigole et chahute dans les moments de détente. Jean-Jacques Boissy et Babacar Sané passent leur temps à taquiner Gora Camara, ancien boxeur. C’est dire que l’ambiance est bon enfant dans la Tanière. « Le groupe vit bien. Nous sommes une famille et c’est important. Cette cohésion nous permet de faire face à toute situation », confie Gora Camara. Ils l’ont eu quand Pape Moustapha Diop perd son père à quelques jours de la 3ème fenêtre. « Il (Pape Moustapha) traverse un moment difficile. Nous partageons sa tristesse et nous faisons tout pour qu’il surpasse cela. C’est le rôle que doit jouer une famille et nous essayons de le faire », soutient le capitaine Brancou Badio.
Un staff bien outillé
Le staff technique joue un rôle important dans ce processus. Ngagne Desagana Diop, Mamadou Guèye « Pabi » et Amadou Mbodji abattent un gros travail depuis juillet 2022. Ils ont su mettre en place un projet cohérent. L’équipe du Sénégal a une identité de jeu sur les deux surfaces du terrain (défense et attaque). Les principes ne changent pas peu importe le contexte. Il arrive des fenêtres où Ngagne Desagana Diop s’absente, c’est Pabi Guèye qui prend le relais. Il y a une a complémentarité et une complicité au sein du staff technique. Ils échangent au quotidien via un groupe WhatsApp. Malèye Ndoye (Manager général) et Makhtar Ndiaye (conseiller du président) jouent aussi un rôle important dans ce staff.
En plus de son vécu d’ancien international, de coach assistant des Lions, Ngagne Desagana Diop s’est forgé en NBA, où il a gravi les échelons avant de prendre les rênes des Westchester Knicks. L’ancien pivot des Mavs a réussi le back to back en NBA G-League Winter Show Case (2023 et 2024). Pabi Guèye est dans la sélection depuis 2017. Il a travaillé avec Abdourahmane Ndiaye « Adidas », Moustapha Gaye, Boniface Ndong et aujourd’hui Desagana Diop. L’entraîneur de l’AS Douanes connait le basket africain au regard de ses différentes expériences surtout avec la Basketball Africa League, où il a disputé une finale et remporté le titre de meilleur coach en 2023. L’expérience et la cohésion permettent au staff technique de travailler en toute sérénité. Ils ne se laissent par divertir par des détails ou des personnes extérieures. Le travail est facilité par le Directeur technique national, Raoul Toupane, qui est sur la même longueur d’ondes que ses entraîneurs.
Préparation et organisation interne
En novembre dernier, Ngagne Desagana Diop avait évoqué son désir de se préparer en Europe et de finir par des matchs amicaux avant de rallier l’Angola. À Rabat en février dernier, le président de la Fédération annonçait que l’entraîneur lui avait déjà soumis son programme. Il restait juste à le soumettre au ministère des Sports. La préparation ne peut pas garantir une victoire finale mais elle permet à l’équipe de mettre tous les atouts de son côté. Et cela doit être possible pour l’État de financer un regroupement de 40 ou 45 jours. Cette question ne va jamais se poser au football. La tutelle est interpellée et devra se réajuster pour contribuer dans cet élan de reconquête du titre africain.
Pour sa part, la Fédération sénégalaise de basketball (FSBB) ne doit pas tout attendre de l’État. Elle doit aller chercher des ressources additionnelles pour faire face à certaines dépenses pouvant intervenir tout au long de la campagne. En outre, la FSBB doit être plus professionnelle dans son approche. L’instance faîtière néglige des aspects importants : le marketing et la communication. La sélection nationale est une vitrine et une meilleure organisation pourrait attirer plus de partenaires, mais il faut d’abord savoir vendre le produit. Il ne sert à rien d’avoir des délégués fédéraux sans utilité, alors qu’on peut renforcer le staff technique et médical. La Commission Haute Performance dirigée par Moustapha Gaye fera sans doute des suggestions. L’Afrobasket 2025 pourrait être celui du Sénégal si toutes les conditions sont réunies. Il ne faudra pas ouvrir des fronts inutiles qui déstabiliseraient le groupe.
Pascal GOMIS